Carlo Rovelli par-delà le visible Mon article 7 Le mystère
J'écris mon blog pour partager ma soif de connaissances, mes réflexions et mes passions et mes lectures. Dans ces articles, je voudrais partager "ma lecture" du livre de Carlo Rovelli "par-delà le visible". Ecrire ce que je retiens de mes lectures me permet de réfléchir à la compréhension que j'en ai. je mets entre guillemets les passages qui me semblent importants ou qui me frappent. Et par dessus tout je fais des recherches sur internet pour compléter ma lecture avec le maximum de liens que souhaite responsables, qui permettent aux lecteurs d'approfondir la connaissance du sujet.
https://monblogdereflexions.blogspot.com/2012/06/equation-du-tout-et-information.html#.W_kUfehKj4b: Equation du tout et...information
http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/a/article-la-poursuite-de-l-espace-temps-quantique-38387.php À la poursuite de l'espace-temps quantique. L'espace et le temps émergeraient de l'intrication quantique de minuscules bribes d'information : telle est l'audacieuse hypothèse explorée par le projet collaboratif It from Qubit (https://arxiv.org/pdf/1306.0545.pdf). Clara Moskowitz]
https://perimeterinstitute.ca/people/research-area/quantum-gravity (liste des chercheurs en gravité quantique)
Site conçu dans le cadre des TPE (Travaux Personnels Encadrés) en classe de Terminale S:
http://gravitations.pagesperso-orange.fr/plan.htm
http://gravitations.pagesperso-orange.fr/boucles.htm (la gravitation quantique à boucles)
Avec les frères Bogdanov: Au commencement du temps 4-9 partie 2) L'Univers information deuxième partie
1) Préambule.
Comme je l'ai dit dans Dans mon article 1, j'ai interrompu mes articles à propos du livre de Lee Smolin "La renaissance du temps" au chapitre 14. Je vais d'abord approfondir la question du temps avec la lecture du livre de Carlo Rovelli "par-delà le visible, la réalité du monde physique et la gravité quantique". Dans l'article 1), j'ai sauté directement à la troisième partie: espace quantique et temps relationnel. Après les rappels historiques passionnants et des explications dont Carlo Rovelli a le secret concernant la relativité et la physique quantique, leurs limites et questionnements et qui ont abouti à ce que Lee Smolin décrit comme la crise de la physique avec son "rien ne va plus en physique", nous abordons ici les mystères de la gravitation quantique dont l'ambition est de dépasser ces problèmes et limites par une nouvelle théorie qui en réalisera peut-être l'unification. Dans l'article 2, nous avons vu que l'espace est un réseau de spins, dont les noeuds représentent les grains élémentaires, et les liens leurs relations de voisinage. L'espace-temps est créé à partir des processus où ces réseaux de spins se transforment les uns en les autres, et ces processus sont exprimés par des sommes de Mousses de spins, où une mousse représente un parcours idéal d'un réseau de spins, c'est à dire un espace-temps granulaire, où les sommets du réseau se combinent et se séparent. Ce pullulement microscopique de quanta à l'origine de l'espace et du temps obéit au calme apparent de la réalité macroscopique qui nous entoure. Chaque centimètre cube d'espace et chaque seconde de temps qui passe sont le résultat de cette mousse dansante de quanta minuscules....
Tous mes articles sur "ma lecture du livre de Carlo Rovelli "par-delà le visible:
Mon article 2: Le temps n'existe pas.
Mon article 3: Au-delà de l'espace et du temps
Mon article 4 cosmologie quantique, confirmations empiriques? la chaleur des trous noirs?
Carlo Rovelli par-delà le visible Mon article 5: la fin de l'infini... ?
Mon article 6: L'information...
Qu'avons-nous appris dans cet article 6?
Carlo Rovelli revient à la théorie et examine ce qu'il appelle un véritable fantôme qui va hanter la physique théorique en suscitant enthousiasme et confusion: "l'INFORMATION". Il pense que de nombreux scientifiques soupçonnent que le concept d'information peut être fondamental pour accomplir de nouveaux pas en avant en physique. Et quel rapport a t-elle avec la gravité quantique?
En 2-1) Introduction sur l'information: on a vu que l'information ne mesure pas ce qu'on sait, mais le nombre d'alternatives possibles, c'est la capacité de distinguer entre des alternatives, la possibilité pour les systèmes physiques de communiquer entre eux.
En 2-2) les réseaux d'information: On a vu que l'idée de Shannon de compter les alternatives et sa théorie de l'information pouvaient conduire à cette vision de l'information comme interconnexion du monde puis comme connaissance du réel?
En 2-3) Ludwig Boltzmann et la chaleur, l'entropie est l'information manquante: on a vu que si un liquide se refroidit, un peu de son énergie est transmise à l'air. Les molécules s'agitent plus lentement, et celles de l'air plus rapidement. Et si on calcule l'information manquante, on trouve qu'elle a augmenté. C'est ce manque d'information que Boltzmann avait pressenti en comprenant ce qu'est la chaleur et pourquoi une tasse d'un liquide chaud laissé seul ne peut que se refroidir au lieu de s'échauffer. Cela a conduit à introduire la notion d'entropie. En physique (source wikipedia), "l'entropie est une grandeur thermodynamique associée à un système de particules, en théorie de l'information, elle quantifie le manque d'information"; toujours selon wikipedia "c'est une propriété étendue d'un système thermodynamique, étroitement liée au nombre Ω de configurations microscopiques (micro-états ) qui correspondent aux quantités macroscopiques qui caractérisent le système (telles que son volume, sa pression et sa température). En supposant que chaque micro-état est également probable, l’entropie S est le logarithme naturel du nombre de micro-états , multiplié par la constante de Boltzmann: S = k . ln Ω
En 2-4) Information et quantique. Jean Zin dans L'entropie, l'énergie et l'information au chapitre "L'entropie est une probabilité statistique (égalisation des températures) "[...] pour expliquer l'entropie il faut donc faire intervenir une perte d'information à chaque collision ou interaction, un oubli des conditions initiales (ou pour suivre le Prigogine de 1962, le fait qu'il y a des composantes négligeables, au regard des composantes principales, dont l'influence est donc perdue. C'est un effet de seuil semble-t-il)... Et plus loin; il dit: "L'information c'est le contraire de l'entropie".
Selon Carlo Rovelli, la structure de la mécanique quantique peut être vue en termes d'information. En effet, sa structure formelle et ses axiomes peuvent être déduits de deux postulats simples:
1) L'information importante dans tout système physique est finie (Il caractérise la granularité de la mécanique quantique)
2) On peut toujours obtenir une nouvelle information sur un système physique (Il caractérise l'indétermination, le fait qu'il y ait toujours quelque chose d'imprévisible, ce qui permet une nouvelle information). L'information que nous avons sur un système donné peut être vue comme conséquence de nos interactions passées avec lui, information qui nous permet de prévoir quel sera l'effet, sur nous de future interactions avec le système.
Pour C. Rovelli, Jonh Wheeler a été un des premiers "à saisir que la notion d'information est fondamentale pour comprendre la réalité quantique". L'équation dite de Wheeler-De Witt a ce ouvert la voie à la gravitation quantique à boucles et à la cosmologie quantique. Wheeler a forgé le concept "it from bit": "tout vient du bit", c'est à dire de l'unité d'information, le choix (alternative minimale) entre un oui et un non. Le sens est donc: TOUT EST INFORMATION. Wheeler croyait qu'une analyse minutieuse de ce qu'est une information et de sa signification peut nous apprendre à connaître la réalité. Carlo Rovelli nous dit qu'en gravité quantique à boucles, "l'aire d'une surface quelconque" .. ."est déterminée par les spins des boucles qui coupent cette surface". Ce sont des quantités discrètes, quantifiées, et chacun d'eux contribue à l'aire. Et il continue: "Et donc, si je connais l'aire de de la surface, mais que je ne sais pas comment sont distribués ses quanta d'aire, j'ai de l'information manquante sur la surface".
C'est Jacob Bekenstein qui, le premier a suspecté que l'information perdue peut apparaître, vue de l'extérieur, comme une entropie associée à l'aire du trou noir. il est le précurseur de la thermodynamique des trous noirs. Il a également abordé divers aspects des liens entre gravitation et information. On parle maintenant de l'entropie de Bekenstein-Hawking. Les trous noirs émettent une radiation thermique de Hawking, deviennent plus petits et finissent par s'évaporer jusqu'à disparaître en posant donc le redoutable problème connu sous le non de paradoxe de l’information qui n'est pas encore résolu. Voir l'article de futura-sciences.com - Trou noir et paradoxe de l'information: le dernier article posthume de Hawking apporte-t-il la solution? Il a été vu sous une nouvelle lumière alors que Cumrun Vafa et Andrew Strominger ont montré que l'on pouvait expliquer la formule de Hawking-Bekenstein pour l'entropie de certains trous noirs, bien particuliers, dans le cadre de la théorie des cordes. L'évaporation complète de ces trous noirs exotiques devait assurer la conservation quantique de l'information, selon la conjecture holographique de
Maldacena. Voir le site futura-sciences.com où il est rappelé que "Bekenstein d'abord, puis Hawking ont montré que la surface de l'horizon des événements d'un trou noir était effectivement une mesure de l'entropie associée à la perte d'information. Pour Gérard 't Hooft et Léonard Susskind, cela voulait dire que l'information perdue concernant un objet en 3D tombant dans un trou noir était caractérisée par un objet en 2D. Ils baptisèrent cette conjecture le principe holographique. Aujourd'hui, certains physiciens supposent qu'il peut s'agir d'une loi universelle. Et Rovelli pense "qu'en réalité, personne n'a bien compris ce qu'est ce principe holographique". On calcule la probabilité de ce qui se trouve sur le bord, mais on en peut jamais décrire ce qui se passe exactement à l'intérieur. Il semble que la réalité en refuse la description complète. Il est question de la relation entre les systèmes et de l'information qu'ils ont les uns sur les autres. C'est cette information que les système s'échangent au bord entre un processus et un autre. De fait, on a toujours des corrélations entre des systèmes au-delà du bord, c'est à dire une situation "statistique". Carlo Rovelli envisage qu'à la base de notre compréhension du monde, outre la relativité générale et la mécanique quantique, il faut inclure la théorie de la chaleur, c'est à dire la mécanique statistique et la thermodynamique, donc la théorie de l'information.
En 3) 3-1) introduction. Le temps thermique. Quand un caillou arrive à terre, il s'arrête, le mouvement est stoppé; mais l'énergie cinétique est transformée en chaleur à ce moment précis. Et c'est un phénomène irréversible. Il distingue le film normal du film inversé de la chute, réversible, le passé du futur. En dernière analyse c'est toujours la chaleur qui distingue le passé du futur.Toutes les fois que se produit un phénomène qui garantit l'écoulement du temps, il y a production de chaleur. Et la chaleur, c'est faire des moyennes sur de nombreuses variables selon la mécanique statistique.
En 3-2) L'idée du temps thermique. Ce n'est pas de comprendre pourquoi le temps produit une dissipation de chaleur...mais pourquoi la dissipation de chaleur produit intrinsèquement, produit et génère du temps? Dans notre vie quotidienne, nous ne regardons pas les molécules, mais les objets macroscopiques, nous sommes toujours corrélés avec des moyennes. Et les moyennes dégagent de la chaleur et intrinsèquement, génèrent du temps. Pour comprendre le temps, il faut donc dépasser notre intuition, car le temps n'est "qu'un effet de notre négligence à l'égard des micro-états physiques des choses", c'est l'information que nous n'avons pas. Le temps est notre ignorance.
En 4) Réalité et information. La question qu'est-ce que le réel? est une question fondamentale de la connaissance humaine. D"Espagnat parle "du réel voilé", qu'on peut mettre en perspective avec le Védanta. La révolution quantique et la philosophie de BOHR, HEISENBERG et SCHRÖDINGER, La nouvelle physique montre la prétention de la mécanique classique à connaître une réalité indépendante est impossible. Nous venons de voir que le temps est notre ignorance. Dans notre intuition, nous confondons ce que nous savons d'un système avec "son état absolu", la réalité indépendante. Ce que nous savons est toujours quelque chose à propos de notre relation entre "nous" et le système. Tout savoir est une relation et dépend donc à la fois de l'objet et du sujet. Il n'y a pas de savoir absolu. C'est pourquoi la notion d'information joue un rôle aussi central. Lorsqu'il est dit que "nous avons de l'information" sur la température mais pas sur la vitesse des molécules, cela n'est pas à comprendre en termes d'idées abstraite ou d'états mentaux. Cela exprime seulement que les lois de la physique ont fait qu'il existe une corrélation entre nous et la température (par ex, nous avons regardé un thermomètre), mais il n'y en a pas entre nous et les vitesses individuelles des molécules. Quand in dit 'la bille blanche dans tes mains a de l'information", c'est le fait qu'elle soit blanche aussi au lieu d'être rouge, ce qui est une des N possibilités du tirage lorsqu'on n' a vérifié ensemble la couleur. car alors, il n'y aurait pas d'information. La bille peut avoir de l'information, même si elle n'a pas d'état mental et ne pense pas, tout comme une clé USB contient de l'information même si elle ne pense pas: c'est le nombre de Gigabits gravés sur la clé qui contient l'information qu'elle peut contenir.
Cette information, ces corrélations entre états des systèmes sont partout dans l'Univers. Carlo Rovelli pense pour comprendre le réalité, il faut savoir que nous nous référons et nous parlons de quelque chose qui est étroitement lié à ce réseau de relations, d'information réciproque, qui tisse le monde. Nous avons morcelé cette réalité en objets mais "en réalité", elle n'est pas faite d'objets, c'est un flux continuel et variable. Nous avons établi des frontières aux objets. Mais où commencent et où finissent les vagues, les montagnes? Pourtant elles ont une réalité. Mais la question a t-elle un sens? Car ce ne sont pas des objets "en soi", mais de habitudes que nous avons prises de découper le monde pour pouvoir en parler plus facilement. Leurs frontières sont arbitraires, conventionnelles et commodes. Ce sont des façons d'organiser l'information ou mieux, des formes de l'information dont nous disposons. Il en est de même de la notion de "système physique", cette notion abstraite qui n'est qu'une idéalisation, une façon d'organiser notre notre information "fluctuante" sur le réel.
Synthèse:
A propos du vivant: C'est un système particulier qui se reproduit, se reforme sans cesse, semblable à lui-même et interagit sans arrêt avec le monde extérieur. Comme ne subsistent que les plus efficaces à le faire, dans les systèmes existants, se manifestent les propriétés qui les font subsister; celles qui rendent leur subsistance possible - c'est pour cela qu'ils sont interprétables et que nous interprétons en termes d'intentionnalité, de finalité. Ainsi, selon C. Rovelli la découverte de Darwin est l'expression, c'est à dire le nom, que nous donnons au résultat de le sélection des formes complexes. Mais la façon la plus efficace pour subsister dans un milieu est de bien gérer ses corrélations avec le monde extérieur, donc l'information qu'on a sur lui (savoir la recueillir, l'emmagasiner, la transmettre et l'élaborer). Pour maximaliser l'efficacité de cette gestion de l'information, les outils on évolué depuis les codes ADN, les systèmes immunitaires, les organes sensoriels, les systèmes nerveux et les cerveaux complexes jusqu'à des langages, des livres, les illustres bibliothèques comme celle d'Alexandrie, les ordinateurs et ...?
A propos de l'information: C. Rovelli approfondit le sens de l'information en rappelant comment "la bille blanche que tu tiens dans ta main" peut te dire que la mienne est blanche aussi. Si, sur l'ensemble de N couleurs différentes, nous voyons tous les deux la même couleur blanche, la quantité d'information est égale à -Log2 N. C'est comme une mesure de la diversité. On peut mettre ceci sur le même plan que celui que C. Rovelli cite à propos d'Aristote: "La statue qu'Aristote voit dans un bloc de marbre existe; elle est réelle et c'est quelque chose en plus du bloc de marbre, mais qui ne s'épuise pas dans la statue même: c'est quelque chose qui réside dans l'interaction entre le cerveau d'Aristote, ou le nôtre, et le marbre. C'est quelque chose qui concerne l'information que le marbre a avec quelque chose d'autre et qui significatif pour Aristote et... pour nous. C'est quelque chose de très complexe qui concerne un discobole, Phidias, Aristote et le marbre, et qui réside dans la disposition corrélée des atomes de la statue et dans les corrélations entre ceux-ci et mille autres dans notre tête et celle d'Aristote."
2) Le dernier chapitre du livre "par-delà le visible": Le mystère
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L'aveugle-né
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En exergue:Platon dans « Théétète » :
« S’étonner, voilà un sentiment qui est tout à fait d’un philosophe. La philosophie n’a pas d’autre origine ».
(Théetète est un dialogue de Platon sur la science et sa définition. Ce dialogue est le premier d'une série de trois (avec Le Sophiste et Le Politique), ou de quatre, si l'on compte Le Philosophe).
Aristote dans « Métaphysique » :
« Le commencement de toutes les sciences, c’est l’étonnement de ce que les choses sont ce qu’elles sont…. Ce fut l’étonnement qui poussa, comme aujourd’hui, les premiers penseurs aux spéculations philosophiques. Au début, ce furent les difficultés les plus apparentes qui les frappèrent, puis, s’avançant ainsi peu à peu, ils cherchèrent à résoudre des problèmes plus importants, tels les phénomènes de la Lune, ceux du Soleil et des Étoiles, enfin la genèse de l’univers. Apercevoir une difficulté et s’étonner, c’est reconnaître sa propre ignorance (et c’est pourquoi aimer les mythes est, en quelque manière se montrer philosophe, car le mythe est composé de merveilleux). Ainsi donc, si ce fut pour échapper à l’ignorance que les premiers philosophes se livrèrent à la philosophie, il est clair qu’ils poursuivaient la science en vue de connaître et non pour une fin utilitaire. »
2-1) Ignorance et connaissance. Carlo Rovelli a terminé le chapitre 12 de "Par-delà le visible" par ces lignes:
"En tant qu'hommes, nous sommes ce que les autres connaissent de nous, et ce que nous connaissons de nous, d'une part et de ce que les autres connaissent de nous, d'autre part. Nous sommes des noeuds complexes dans un réseau très riche d'informations réciproques. Tout cela n'est pas une théorie. Ce sont des traces, sur lesquelles nous évoluons - je crois - pour tenter de comprendre un peu mieux notre monde intérieur. Il nous reste beaucoup à comprendre".
En retraçant le développement des idées clé de la physique fondamentale et les grandes découvertes de la physique du XXè siècle, avec une image du monde en train d'apparaître dans les recherches orientées vers la gravité quantique, Carlo Rovelli est-il sûr de tout cela? Il répond non sans hésiter.
Il écrit qu'un des premiers à avouer ne pas être sûr du savoir de son temps a été Socrate. Une premières et plus belles pages de l'histoire des sciences est celle du Phédon de Platon dans lequel Socrate explique la forme de la Terre. On lit en LVIII: "-Alors Simmias prit la parole : « Que dis-tu là, Socrate ? Au sujet de la terre j’ai entendu dire, moi aussi, bien des choses, mais qui ne sont pas celles dont tu es convaincu ; aussi j’aurais plaisir à t’entendre.
- Pour exposer ce qui en est, Simmias, je ne crois pas qu’on ait besoin de l’art de Glaucos ; mais d’en prouver la vérité, la difficulté me paraît excéder l’art de Glaucos. Peut-être même n’en suis-je pas capable, et à supposer même que je le sois, le temps qui me reste à vivre ne suffirait sans doute pas à une si longue exposition. Néanmoins rien ne m’empêche de dire quelle idée on m’a donnée de la forme et des différents lieux de la terre [...] Eh bien donc, je suis persuadé pour ma part que tout d’abord, si la terre est de forme sphérique et placée au milieu du ciel, elle n’a besoin, pour ne pas tomber, ni d’air ni d’aucune autre pression du même genre, mais que l’homogénéité parfaite du ciel seul et l’équilibre de la terre seule suffisent à la maintenir ; car une chose en équilibre, placée au milieu d’un élément homogène, ne pourra ni peu ni prou pencher d’aucun côté et dans cette situation elle restera fixe. Voilà, ajouta-t-il, le premier point dont je suis convaincu [...]. Ainsi, Socrate "croit" que la terre est une sphère. C. Rovelli parle avec enthousiasme de ce texte, le plus ancien qui soit parvenu jusqu'à nous et qui dise explicitement que le Terre est ronde. Mais, tel un bon scientifique, Platon reconnaît les limites du savoir de son époque. "Je n'en suis pas sûr" dit Socrate. C'est cette conscience aiguë de notre ignorance qui est au coeur de la pensée scientifique. Comme mis en exergue, Aristote, dans Métaphysique, la situe dans la capacité de s'étonner: « [...] Ce fut l’étonnement qui poussa, comme aujourd’hui, les premiers penseurs aux spéculations philosophiques [...] Ainsi donc, si ce fut pour échapper à l’ignorance que les premiers philosophes se livrèrent à la philosophie, il est clair qu’ils poursuivaient la science en vue de connaître et non pour une fin utilitaire.» Aujourd'hui, l'homme explore ce qui se trouve au bord de notre savoir. Dans son livre les limites de la connaissance, Hervé Zwirn "constate que, alors que la fin du 19ème siècle était pleine des promesses d’une science progressant de façon certaine et assurée vers la connaissance parfaite et complète de la nature, la fin du 20ème siècle ne peut que constater l’échec de cet espoir". C'est cette manifestation et l'expression de mon étonnement qui m'ont amené à donner "ma lecture" de ce livre dans les articles de mon blog dans la catégorie "les limites de la connaissance", à voir en fin de cet article 7. Le dernier étant Les limites de la connaissance 6-8) Conclusion la cécité empirique: "La science nous permettra-t-elle un jour de tout savoir? Ne rêve-t-elle pas d'une formule qui explique tout? N'y aurait-il rien qui entrave sa marche triomphale? Le monde deviendra-t-il transparent à l'intelligence humaine? Tout mystère pourra-il être à jamais dissipé? Hervé Zwirn pense qu'il n'en n'est rien.La science, en même temps qu'elle progresse à pas de géant marque elle même ses limites. C'est ce que montre la découverte des propositions indécidables qui ont suivi le théorème de Gôdel. Ou celle des propriétés surprenantes du chaos déterministe. Ou encore les paradoxes de la théorie quantique qui ont opposé Einstein et Bohr en mettant en cause toute notre manière de penser. L'analyse de ces limites que la science découvre à sa propre connaissance conduit à poser une question plus profonde: qu'est ce que le réel?"
Liens:
http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/platon/phedonfr.htm: Le phédon de Platon
https://archipel.uqam.ca/773/1/M10030.pdf: LES ÉLÉMENTS ORPHIQUES DANS LE PHÉDON DE PLATONhttps://journals.openedition.org/asr/1247: Les interprétations néoplatoniciennes du Phédon de Platon
2-2) Connaissance et certitude.
Mais la conscience des limites de notre connaissance doit aussi être conscience du fait que ce que nous savons, ou croyons savoir peut s'avérer imprécis, voire erroné... des ombres projetées sur la paroi de la caverne de Platon. La science naît de cette attitude d'humilité, il ne faut pas se fier aveuglément à ses intuitions ou à ce que tout le monde dit, ni à la connaissance accumulée par nos pères et nos aïeux. En effet, nous n'apprenons rien si nous croyons que l'essentiel a été dit ou écrit et que c'est suffisant. Il est vrai que durant les siècles durant lesquels les hommes ont eu une "foi aveugle" en ce qu'ils croyaient, tout restait figé et on n'apprenait rien de nouveau. C'est parce qu'ils ont remis en cause les croyances et les savoirs de leurs aïeux que Copernic, Newton et Einstein ont permis à notre savoir de progresser. Mais même le savoir le plus élaboré de son époque, celui de Newton, peut se révéler finalement naïf, comme l'a montré Einstein. Contrairement à ce qu'on reproche souvent à la science, "celle-ci" ou plutôt les "véritables" scientifiques ne prétendent pas tout expliquer. Faire de le science, c'est signifie se confronter quotidiennement à ses limites, à ses propres limites ou aux limites de la connaissance, à tout ce qu'on ignore ou qu'on ne parvient pas à faire; on est loin de la prétention à tout expliquer. Et c'est bien ce qui se passe dans le cas des recherches sur la gravité quantique à boucles.
Mais, si on n'est sûr de rien, comment pouvons-nous nous fier à ce que dit la science? La réponse de C. Rovelli est: "ce n'est pas parce qu'elle nous donne des réponses certaines, mais parce qu'elle nous donne nous fournit les meilleures réponses au moment présent,les meilleures réponses trouvées jusque là". C'est son ouverture à l'apprentissage et à la remise en question du savoir qui garantit que les réponses qu'elle offre sont les meilleures disponibles et si on trouve de meilleures, ces nouvelles réponses deviennent de la science. Par conséquent, les réponses de la science ne sont pas fiables parce que'elles sont définitives mais parce que ce sont les meilleures disponibles à l'heure actuelle et ceci parce qu'elles ne sont pas considérées comme définitives, et c'est la raison pour laquelle les scientifiques sont toujours disposés à les améliorer. Pour Carlo Rovelli, ce n'est pas la certitude dont nous avons besoin, c'est la fiabilité. Car on n'a pas de vraies certitudes et on n'en n'aura jamais. Les réponses les plus fiables sont les réponses scientifiques.
La science plonge ses racines dans une histoire qui remonte à des millénaires, peut-être beaucoup plus. C. Rovelli, dans son livre, fait remonter cette histoire à la culture grecque. Pour le site actuphilosophia.com, "il défend "une certaine idée de la science ainsi qu’une épistémologie résolument matérialiste et extrêmement sévère, l’amenant à critiquer parfois vertement certaines physiques de l’Antiquité qui se trouvent moins condamnées pour leur ancienneté que pour leur refus de suivre les intuitions de Démocrite. La référence pourtant inaugurale de Rovelli demeure Anaximandre auquel il a consacré un bel ouvrage [Anaximandre de Milet ou la naissance de la pensée scientifique] [...] Ainsi ouvre-t-il son ouvrage "Par-delà le visible" par une assez longue description de ce que fut la science grecque, en insistant évidemment sur ses chers Milésiens. Il rend un hommage appuyé à Anaximandre, mais aussi à Démocrite et Leucippe qui avaient compris la nature illimitée de l’espace, la nécessité de raisonner avec des atomes, et l’ineptie d’un haut et d’un bas absolus. Et l’auteur n’hésite pas à tracer une sorte de longue chaîne des siècles qui, partie des atomistes antiques, trouverait une confirmation définitive avec Einstein..." On a vu aussi en l'exergue à ce chapitre qu'avec Platon et Aristote, « Le commencement de toutes les sciences, c’est l’étonnement ». Cette histoire dont on a tiré profit de chaque pensée, la science n'a pas hésité à en rejeter une partie quand il en était trouvé une plus efficace. La pensée scientifique est par nature critique, rebelle, elle ne tolère pas les vérités intouchables. Elle ne se nourrit pas de certitudes mais d'un manque radical de certitudes. Cela signifie qu'elle n'accorde pas son crédit à qui prétend détenir la vérité. C'est pourquoi la science et la religion se trouvent souvent opposées. Mais sont-elles incompatibles? science et foi s'opposent-elles? dieu et la science: le débat existe-t-il? Dieu, le Big Bang et le débat science/foi.
2-3) Le dernier chapitre du livre "par-delà le visible: le mystère.
Pour aborder ces questions, voyons ce qui se passe quand il y a un manque radical de certitudes. Accepter l'incertitude de notre savoir, c'est accepter de vivre plongés dans l'ignorance et donc dans le mystère. C'est vivre avec des questions auxquelles nous ne savons pas (peut-être pas encore, voire jamais) répondre. Face à l'incertitude, née de la conscience de ses propres limites, les réponses et le attitudes sont très variables. C. Rovelli l'analyse ainsi: certains préfèrent n'importe quelle certitude, même non fondée. "D'autres préfèrent croire à une histoire juste parce qu'y croyaient les anciens de la tribu - peu importe qu'elle soit vraie ou fausse - plutôt que d'accepter le courage de la sincérité: accepter que nous vivions sans savoir tout ce que nous aimerions savoir". L'ignorance peut faire peur et je comprends l'analyse de C. Rovelli lorsqu'il dit "Par peur, nous pouvons nous raconter une histoire qui nous rassure, quelque chose qui calme notre inquiétude". Les religions on inventé les paradis et les jardins enchantés. "Peu importe si c'est vrai; nous pouvons décider d'avoir foi en cette rassurante histoire, mais elle nous ôte l'envie d'apprendre". Rovelli insiste beaucoup sur cette prétention de tous ceux qui prétendent avoir des réponses ultimes et détenir la Vérité, qu'ils l'aient apprise de leurs pères, lue dans un Grand Livre ou reçue directement d'un Dieu. Il voit aussi une réponse à cette peur dans celle que Saint Augustin a entendue (cité dans les confessions au chapitre XII) pour la question "que faisait Dieu avant de créer le monde?": C. Rovelli dit seulement: "Alta... scrutantibus gehennas parabat" (Il préparait des supplices à ceux qui scrutent ces profonds mystères). Mais on trouve une réponse plus complète et subtile dans ce site "Et je réponds à cette demande : Que faisait Dieu avant de créer le ciel et la terre? Je réponds, non comme celui qui éluda, dit on, les assauts d’une telle question par cette plaisanterie : Dieu préparait des supplices aux sondeurs de mystères. Rire n’est pas répondre. Et je ne réponds pas ainsi. Et j’aimerais mieux confesser mon ignorance, que d’appeler la raillerie sur une demande profonde, et l’éloge sur une réponse ridicule. Mais je dis, ô mon Dieu, que vous êtes le père de toute créature, et s’il faut entendre toute créature par ces noms du ciel et de la terre, je le déclare hautement: avant de créer le ciel et la terre, Dieu ne faisait rien. Car ce qu’il eût pu faire alors, ne saurait être que créature. Oh ! que n’ai-je la connaissance de tout ce qu’il m’importe de connaître, comme je sais que la créature n’était pas avant la création !" Et Rovelli cite cette même "profondeur" de l'abîme où Démocrite dit qu'il va chercher la vérité: "La vérité est au fond de l'abîme" (cité par Diogène Laërce dans "vie doctrines et sentences des philosophes illustres").
C. Rovelli préfère "regarder notre ignorance en face, l'accepter et tenter de regarder au-delà, d'essayer de comprendre...". Je partage son point de vue, c'est bien la meilleure façon de faire face à la superstition et aux préjugés et... la plus vraie, la plus belle et la plus honnête. C'est aussi l'émerveillement que j'ai découvert dans le village de mon enfance où j'avais reçu en cadeau d'anniversaire le livre "les merveilles de la nature", livre magnifique s'il en est. Je l'ai gardé toute ma vie. C'est là que j'ai eu une fascination pour ces merveilles qui constituent l'essence et le titre de mon blog. Je ne me lassais pas des images d'astronomie, comme celle d'une éclipse de soleil, de paléontologie avec les dinosaures, des plantes, d'animaux... Comme C. Rovelli, j'aime ces choses splendides qui donnent sens à la vie, comme la curiosité d'apprendre, de découvrir et regarder au-delà du paysage, contempler le ciel...
Certes, "le monde est plus extraordinaire et profond que n'importe laquelle des fables que nous racontent nos pères". Accepter l'incertitude ne nous enlève pas la goût du mystère. Suivons l'enthousiasme justifié (et que je comprends) de Rovelli, qui le libère dans ce dernier paragraphe du livre. "Nous sommes plongés dans le mystère et dans la beauté du monde. Le monde dévoilé par la gravité quantique est un monde nouveau, étrange, encore plein de mystère, mais cohérent dans sa beauté simple et limpide. C'est un monde qui n'existe pas dans l'espace et qui n'évolue pas dans le temps. Un monde fait seulement de champs quantiques en interaction, dont le pullulement de quanta engendre, à travers un réseau dense d'interactions réciproques, espace,temps, particules, ondes et lumière. Un monde sans infinis, où l'infiniment petit n'existe pas, car une échelle minimale, au-dessous de laquelle il n'y a rien, s'y oppose. Des quanta d'espace se confondent dans la mousse de l'espace-temps et de la structure des choses naît de l'information réciproque que tissent les corrélations entre les régions du monde. Un monde que nous savons décrire par une ensemble d'équations... qu'il faudra sans doute corriger".
3) En guise d'épilogue au livre de C. Rovelli.
3-1) Une solution à la crise de la physique?
Nous avons vu dans mes articles 1, 2, 3, 4, 5, 6 précédents articles que le science était arrivé à un point crucial, qui permet à Lee Smolin de dire "rien ne va plus en physique". Comme solution, il propose "la renaissance du temps" dont je donne ma lecture dans mes articles dans cette catégorie "la renaissance du temps". Aurélien Barrau en parle en ces termes: "les propositions nouvelles face aux problèmes et paradoxes de la physique "peuvent constituer une "pulsion inchoactive" qui poussera vers une découverte sans précédent ou bien vers un réenchantement de ce que l'on savait déjà sans en avoir pris la "dé-mesure" et finalement vers une nouvelle sacralisation du "monde".
Carlo Rovelli, lui, dans "Par-delà le visible" dont mes articles 1 à 6 sont "ma lecture", propose une fresque des grandes avancées de la science au-delà de ces difficultés avec l'approche de la gravité quantique à boucles. Il me semble qu'il voit dans les secrets de l'INFORMATION le creuset qui permettra peut-être aux chercheurs intrépides actuels ou des nouvelles générations de sortir de l'impasse. C'est ce que nous avons vu dans mon article 5 (la fin de l'infini) où il est dit: "comme selon d'Espagnat, le réel est voilé, il n'est pas impossible qu'au bout du compte Max Tegmark ait vu juste: l'Univers n'est pas simplement décrit par les mathématiques, il EST un objet mathématique". Et dans ce cas, un des éléments essentiels pour la connaissance de ce qui est, c'est l'information. C'est l'objet du dernier chapitre du livre de Carlo Rovelli et de mon article 6 (l'information). Nous conclurons avec Vincent Verschoore: Information, réalité fondamentale de l'Univers? "L’information fait partie de notre quotidien, elle en est même l’élément central. Rien n’est possible sans la récolte, le traitement et la transmission d’information, quels qu’en soient les moyens. Et pourtant aucune des grandes théories de la physique, mécanique quantique ou relativité, ne définissent la notion d’information – ni même ne proposent de manière de la mesurer. En outre l’information a une caractéristique particulière qui est la contrafactualité physique ou philosophique: un message est sans information si un message alternatif n’est pas possible. On doit toujours pouvoir poser la question "Et si… " . Nous ne saurons donc pas encore si le questionnement de Carlo Rovelli est la piste qui permettra (avec la gravité quantique à boucles) de sortir de cette crise de la physique... à suivre!
3-2) A propos du "mystère".
Retour sur le questionnement de C. Rovelli du chapitre 2-2): la pensée scientifique est par nature critique, rebelle, elle ne tolère pas les vérités intouchables. Elle ne se nourrit pas de certitudes mais d'un manque radical de certitudes. Cela signifie qu'elle n'accorde pas son crédit à qui prétend détenir la vérité. C'est pourquoi la science et la religion se trouvent souvent opposées. Mais sont-elles incompatibles? science et foi s'opposent-elles? dieu et la science: le débat existe-t-il? Dieu, le Big Bang et le débat science/foi. Et au chapitre 2-3) nous avons vu que C. Rovelli pense de certains qu"ils préfèrent n'importe quelle certitude, même non fondée. "D'autres préfèrent croire à une histoire juste parce qu'y croyaient les anciens de la tribu - peu importe qu'elle soit vraie ou fausse - plutôt que d'accepter le courage de la sincérité: accepter que nous vivions sans savoir tout ce que nous aimerions savoir" et "Par peur, nous pouvons nous raconter une histoire qui nous rassure, quelque chose qui calme notre inquiétude". Il dit que les religions ont inventé les paradis et les jardins enchantés et "Peu importe si c'est vrai; nous pouvons décider d'avoir foi en cette rassurante histoire, mais elle nous ôte l'envie d'apprendre". Il insiste beaucoup sur cette prétention de tous ceux qui prétendent avoir des réponses ultimes et détenir la Vérité, qu'ils l'aient apprise de leurs pères, lue dans un Grand Livre ou reçue directement d'un Dieu. Et enfin Il voit aussi une réponse à cette peur dans celle que Saint Augustin a entendue (cité dans les confessions au chapitre XII), réponse à la question "que faisait Dieu avant de créer le monde? : "Alta... scrutantibus gehennas parabat?" Il préparait des supplices à ceux qui scrutent ces profonds mystères nous dit seulement Rovelli. Mais on trouve une réponse plus complète et subtile dans ce site "Et je réponds à cette demande : Que faisait Dieu avant de créer le ciel et la terre? Je réponds, non comme celui qui éluda, dit on, les assauts d’une telle question par cette plaisanterie : Dieu préparait des supplices aux sondeurs de mystères. Rire n’est pas répondre. Et je ne réponds pas ainsi. Et j’aimerais mieux confesser mon ignorance, que d’appeler la raillerie sur une demande profonde, et l’éloge sur une réponse ridicule. Mais je dis, ô mon Dieu, que vous êtes le père de toute créature, et s’il faut entendre toute créature par ces noms du ciel et de la terre, je le déclare hautement: avant de créer le ciel et la terre, Dieu ne faisait rien. Car ce qu’il eût pu faire alors, ne saurait être que créature. Oh ! que n’ai-je la connaissance de tout ce qu’il m’importe de connaître, comme je sais que la créature n’était pas avant la création !" N'est-ce pas une façon de regarder le "mystère" avant que la science ne prenne un essor vertigineux avec Copernic et n'aboutisse à la crise actuelle de la physique? Et C. Rovelli nous a bien dit "Accepter l'incertitude ne nous enlève pas le goût du mystère".
3-3) Les lumières et la science - Science et religion- Problématique de la science.
-Les lumières et la science
Dans le chapitre 3) de mon article 5 nous avons vu que la science moderne, "cette façon de connaître le monde, a pris son essor au XVIIe siècle. À partir de ce moment inaugural, en moins d'un siècle, on est passé d'une nature mystérieuse, où intervient Dieu ou des forces occultes et que l'on tente de comprendre de manière spéculative, à un univers mécanique explicable par la raison appuyée sur l'expérimentation".
Cette science victorieuse et dominatrice qui occulte la révélation dont parle René Girard a certes permis ce que l'on nomme dorénavant le progrès d'abord scientifique, mais de plus en plus technologique. Il semble irrésistible, mais on en aperçoit maintenant les limites et les dangers. C'est ce qu'a bien vu Bertrand Vergely dans obscures lumières et que j'ai voulu partager dans un article de mon blog: Obscures lumières par Bertrand Vergely -le prologue - "On voudrait nous faire croire que les Lumières ont été totalement lumineuses. Mais la Révolution française a débouché sur la Terreur, avant d’accoucher de l’Empire. Est-ce un accident ? Il n’en est rien. Il y a dans la Révolution française une double contradiction. Alors qu’elle se veut antireligieuse, elle donne naissance avec Robespierre au culte de l’Être Suprême. Alors qu’elle se veut morale, elle fait le lit du libertinage poussé au paroxysme par Sade. Il y a une raison à cela. La Révolution française a voulu être révolutionnaire. Elle a cru qu’elle pouvait l’être. Mais elle a été dévorée inconsciemment par l’Ancien Régime dont elle ne s’est jamais vraiment débarrassée. Cette ombre a pesé sur elle. Elle pèse encore sur nous." Dans un autre passage, on peut lire: "En rejetant la contemplation au profit de l’action perpétuelle, Diderot place la force au centre de l’histoire. « Toute la violence de la modernité et des Lumières, écrit avec raison Vergely, se trouve là. » Et on n’insistera pas sur l’âme d’exterminateur de Voltaire qui traitait les Juifs d’ennemi du genre humain…Bref, les Lumières créent un monde qui « domine tout, qui maîîtrise tout, par la politique et par la science », ce que furent exactement les utopies totalitaires...".
Par cette science, notre culture semble avoir dépassé le stade du mythe parce que l'opinion dominante pense que la représentation objective de la science moderne nous en débarrassés. Mais est-ce si sûr? Les mythes technologiques (manipulations génétiques, réalité virtuelle) avec leur problématique et leur questionnement ne sont-ils pas la suite des mythes de l'antiquité, grecque en particulier? Auguste Comte n'a-t'il pas créé la religion positiviste? Noam Chomsky se demande si L'intelligibilité du monde est à portée de la science et répond par la négative et la réponse à la question "la science est-elle vraie" ne va pas de soi "Au XXe siècle, le chaos et le hasard ont fait irruption dans la science. La philosophie des sciences a dû s’affirmer pour accompagner cette évolution sans se trouver elle-même rejetée dans ce chaos. On ne sait pas si la science est vraie, mais on peut affirmer tout de même qu’elle s’appuie sur des faits et sur des idées, sur des expériences et sur des paradigmes. On doit également renoncer à démontrer la primauté du fait sur l’idée ou de l’idée sur le fait. L’époque n’est plus aux philosophies fermées mais aux idées complexes, ouvertes, comme aurait dit Gaston Bachelard. Les faits et les idées s’influencent réciproquement, avancent ensemble, cahin-caha. Ainsi marche la connaissance d’un pas d’écrevisse vers un but indéfini".
-Science et religion: le débat reste ouvert
Mais sont-elles incompatibles? Science et foi s'opposent-elles? Dieu et la science: le débat existe-t-il? Dieu, le Big Bang et le débat science/foi. Hubert Reeves: la science et la religion ne sont pas incompatibles, mais il vaut mieux les séparer. Science et religion n'ont rien à se dire. Le christianisme est-il une foi aveugle?
Pour ces questions, ce sera un autre débat. On assiste, est-il dit dans le site huet.blog.lemonde.fr à une ’"expulsion lente et inexorable de Dieu" et est-ce «l’intersection vide de deux univers de discours?». Il me semble que le questionnement de C. Rovelli et d'autres chercheurs sur "ce Mystère" où l'information joue un rôle fondamental peut converger vers une vision holistique du monde où la scission sujet/objet décelée par Shrödinger trouvera sa ré-solution.
Le blog de guykarl.canalblog.com propose cependant une réflexion qui me donne à réfléchir: "La mystique propose une sorte de fusion du sujet dans le Tout, que nous pouvons certes expérimenter à l’occasion, mais qui ne fournit aucune sorte de connaissance communicable, qui repose sur l’effusion du sentiment, et parfois, il faut bien le dire, sur une élation pathologique. De telles extases sont vécues par les poètes, elles nous ravissent, et nous déçoivent tout aussitôt. Voir par exemple les superbes développements de Hölderlin dans les premières pages de son Hypérion : l’exaltation cosmique l’emporte au-delà des bornes de la subjectivité, le dissout dans l’illimité de la nature, et soudain l’abandonne. Le sentiment de perte est encore plus vif après tant de sublimes espérances. La raison ne peut dépasser l’opposition puisqu’elle repose sur elle. Le sentiment nous égare. Que reste-t-il ? Il nous reste cet humble témoignage de l’expérience. A de certains moments quand nous renonçons à penser, quand nous nous abandonnons au cours du Grand Fleuve, nous sommes au plus près de l’énigme. Sans passion, sans raison, sans exaltation, nous expérimentons cette grande paix qui nous délasse du souci et du travail de pensée. C’est la simple présence de l’être-là où se donne ce que nul ne cherche, et qui s’en va, et qui reviendra peut-être. En tout cas cela n’a rien à voir avec la connaissance, ni avec le sentiment : il y a, et cela suffit". Nous avons peut-être atteint ici la limite extrême de la connaissance dont "nous ne pouvons juger de la valeur faute de critère extérieur à nous" et comme le dit Guy Karl: "[...] si, comme chez Descartes, Dieu en personne venait garantir la validité de nos lois la cause serait entendue. Mais il n’en est rien. Depuis longtemps Dieu a raccroché son téléphone".
Mais Dieu a t-il vraiment raccroché? Dieu, le big bang et le débat science-foi cite ces paroles incompréhensibles pour un scientifique qui n'a pas la foi: "Quand Christ devint homme ce fut comme si l’auteur de la création s’écrivait un rôle dans sa propre pièce. Certains furent confus et offensés par ses déclarations. Quand Jésus dit: Avant qu’Abraham fut, moi, je suis ! (Jean 8 : 58)."
-Problématique de la science.
*Commençons par un article de Léna Soler: certitudes, incertitudes et enjeux de la philosophie des sciences contemporain. Elle écrit, en résumé: "le présent article dresse un inventaire des principaux problèmes, mis en évidence par la philosophie des sciences contemporaines, auxquels se heurte la conception commune de la science comme ensemble de propositions bien assurées issues de l’observation et fondées sur elle. Il examine à partir de là ce qui peut encore être soustrait au doute, et soutient finalement que si la science n’est peut-être pas exactement ce que l’on avait cru, il n’y a pas pour autant lieu de conclure au relativisme extrême". Et on trouve dans l'ensemble des conclusions de Léna Soler:
79- Bref, l’histoire des sciences aurait pu être autre (même si elle n’aurait pas pu être n’importe quoi) : le contenu des théories scientifiques retenues à chaque étape aurait pu être différent. L’on n’a donc pas affaire à une évolution nécessaire. Et l’on n’est jamais autorisé à conclure que les données disponibles à un moment donnée imposent à tout être raisonnable une théorie déterminée, sorte de double approximatif du réel.
80- Les certitudes et incertitudes associées à une telle conception de l’histoire des sciences sont-elles beaucoup ou sont-elles peu ? Portent-elles un coup fatal, ou ne font-elle qu’égratigner l’image et la valeur de la science ?
Cela semble ne pas être en contradiction avec tout ce que nous avons vu ni avec ce que C. Rovelli dit au chapitre 2-3): "regarder notre ignorance en face, l'accepter et tenter de regarder au-delà, d'essayer de comprendre...".
*Et plus grave:
Peut-on encore se fier aux études scientifiques?. C'est la question que pose Vincent Lucchese: "La science est invoquée aussi bien pour prouver l’innocuité du glyphosate que sa toxicité. On apprend un jour que des chercheurs n’arrivent à reproduire les résultats que de la moitié des études de leurs confrères et un autre jour que 2 % des scientifiques interrogés par Nature ont déjà falsifié des résultats. Publier est devenu le Graal de la science, la condition pour obtenir des financements. Le nombre d’études explose : plus de 2,5 millions d’articles écrits tous les ans selon Le Monde. Entre fraudes, controverses et conflits d’intérêt, il y a de quoi se perdre dans cette jungle de littérature scientifique. « Qu’est-ce que la vérité scientifique ? », en vient à se demander le CNRS lors de son forum. Nous nous sommes penchés sur la question".
La fiabilité des études scientifiques en question (Fraudes, business et politique) par www.egaliteetreconciliation.fr, fondé par Alain Soral. L'article titre: "L’analyse de nombreuses études publiées dans les grandes revues médicales et scientifiques le montre : elles sont souvent fausses. La majorité d’entre elles n’est pas « réplicable ». C’est flagrant en psychologie, en pharmacie et d’une manière générale dans les sciences humaines, mais le phénomène touche aussi une science dure comme la physique des particules. La proportion des études fiables régresse".
Les deux problèmes précédents doivent être regardés avec sérieux car ils n'ont pas de solution facile. La science est de plus en complexes et les intervenants de plus en plus en plus variés, avec des intérêts qui ne convergent pas forcément: scientifiques, individus sociaux (qui peuvent être les mêmes avec des intérêts divergents), catégories sociales, organisations ou associations, groupes financiers, politiques....
J'ai terminé cette lecture par deux de mes articles consacrés à ce qui pourrait être un suite imaginaire (?) du mystère que Carlo Rovelli nous a fait découvrir à la fin de son livre. Ce serait L'Univers information deuxième partie et L'Univers information première partie.
Dans la première partie, nous avons vu que notre quête du commencement du temps et "La recherche de l'ombre portée par la cinquième dimension dans notre réalité s'achève." Nous avons rencontré à de nombreuses reprises le concept d'information. Il se retrouve aux deux bouts de la chaîne du temps: là où il commence, au coeur de la singularité initiale, et là où il s'achève, dans le "piège" de la singularité finale. Dans les deux cas, c'est là où, pour les frères Bogdanov, il devient imaginaire. Nous concluons cette quête du commencement du temps par un dernier article, celui de l'Univers information. Qu'allons y trouver de nouveau?
Comme la plupart des interrogations touchant à l'essence même des choses et au sens caché de notre existence, celles-ci semblent "comme reflétées, portées et déjà présentes au sein de la question unique, l'une des plus fascinantes de toutes: le temps a-t-il eu un commencement?" Et ce commencement ressemble-t-il à ce que nous avons vu au cours de nos articles, dont le dernier, Au commencement du temps 4-8) Au fond d'un trou noir? Est-il raisonnable et pensable de considérer avec les frères Bogdanov que l'Univers est né d'un prodigieux "flot" d'information qui aurait trouvé sa source dans le zéro?
a) La réponse à cette question passe, pour commencer, par l'étrangeté du monde qui nous entoure. Derrière les scènes de la vie quotidienne et les divers objets qui nous environnent, se dissimulent des forces fondamentales. En fait, il n'existe en tout et pour tout que quatre forces dans la nature. Elles expliquent à la fois le comportement des atomes et celui des étoiles, la désintégration des particules élémentaires ou la course des galaxies dans l'immensité de l'Univers. Certains pensent qu'il existe peut-être une cinquième force responsable de l'accélération accélérée de l'Univers, mais pour le moment il s'agit d'hypothèses.
b) Et si l'une des forces, la gravitation par exemple, pour une raison inconnue, cesse d'être active (Que se passerait-il si le soleil disparaissait d'un coup?).
c) Mais qu'en est-il des trois autres forces? Commençons par la force électromagnétique que nous côtoyons à chaque instant. C'est elle qui assure la cohésion de la matière solide et qui s'oppose à la dissolution pure et simple de tous ces objets. Elle est portée par les photons.Mais que se passerait-il si elle venait à disparaître subitement? Cette fois, nous serions confrontés à des conséquences encore plus épouvantables que dans le cas de la gravitation: tous les objets se dissocieraient en quelques instants. Pour la disparition de la force nucléaire faible le scénario serait aussi désastreux. Nous assisterions, impuissants à l'extinction pure et simple du soleil. Pourquoi? Parce que la fusion thermonucléaire est à l'origine de son rayonnement et il repose sur les interactions nucléaires faibles. On peut imaginer ce qui se produirait si l'effet de l'interaction nucléaire forte, un peu comparable à une sorte de "colle" qui assure la cohésion du noyau atomique, cessait brutalement. Les protons, de charge positive, se repousseraient violemment avant de se dissocier à leur tour en particules infinitésimales. Tout dans l'Univers, serait transformé en vapeur de "quarks" ultimes constituants du proton (et du neutron).
e) Qu'est-ce que la réalité? Dans la vie courante, la réalité nous apparaît sous une forme tangible. Nous pensons que les objets sont composés de particules à propos desquels nous supposons, intuitivement qu'il s'agit de petits grains de matière. Mais en même temps, lorsque nous lâchons l'objet, la réalité se manifeste sous une autre forme, immatérielle: la force de gravitation, qui agit sur la matière et sur ses particules.
Dans mon article 6), nous avons examiné la question qu'est-ce que le réel? au chapitre 2-2) Que sont les réseaux d'information? et au chapitre (4) Réalité et information. C'est une question fondamentale de la connaissance humaine et nous avons noté avec le site Physique quantique et Vedanta une mise en perspective de l'école Védanta, en particulier de l'Advaïta védanta avec le « réel voilé » et la "physique et réalité" de B.d’Espagnat, c'est à dire un rapprochement des pensées indiennes et de la science moderne. Dans ce chapitre 4) nous avons aussi vu que le temps est notre ignorance. De plus, dans notre intuition, nous confondons ce que nous savons d'un système avec "son état absolu" (le réel?). Ce que nous savons est toujours quelque chose à propos de notre relation entre "nous" et le système qu'on étudie. La prétention de la mécanique classique à connaître une réalité indépendante est impossible. C'est pourquoi la notion d'information joue un rôle aussi central
La deuxième partie de l'article 9) rappelle qu'au voisinage du mur de Planck et à fortiori avant, les lois, dans le meilleur des cas, se transforment, et au pire, s'effondrent. Mais la singularité garde tout son mystère. Les physiciens n'ont pas la moindre idée (actuellement) de ce qu'elle est.
Pour Etienne Klein, on ne peut expliquer l'Origine de quelque chose en invoquant autre chose. On n'exprime l'être que par l'être et pas par du devenir. Si on dit qu'à l'Origine il y avait déjà ceci ou quelque chose, on n'explique pas l'Origine, sauf à invoquer que la chose a toujours été là, donc qu'il n'y a pas d'Origine. En fait, pour lui, la science ne peut dire que deux choses:
-1) Il n'est pas prouvé que l'Univers a eu une Origine, qui serait le transit qui fait passer de l'absence de toute chose à au moins une chose.
-2) Il n'est pas prouvé que l'Univers n'a pas d'Origine.
C'est donc, comme la question de Dieu (si on se réfère à des philosophes comme Kant), du domaine de l'indécidable au sens de Gödel. Rappel des points importants de cet article 9):
a) Avant de répondre à la question "est-il raisonnable et pensable de considérer que l'Univers est né d'un prodigieux flot d'information qui aurait trouvé sa source dans le zéro?", nous avons d'abord pénétré dans l'étrangeté du monde qui nous entoure. plongeons maintenant dans cet Univers information et mathématique, en rejoignant en cela Max Tegmark (Notre univers mathématique En quête de la nature ultime du Réel). Nous nous dirigerons ainsi vers les questions: existe-t-il un code initial? Une information initiale et finale?
b) Leibniz et le mystère l'origine (l'équation Bogdanov?) Répondre à la question "qu'y a t-il au commencement du temps", c'est aller jusqu'au pourquoi des choses et jusqu'à l'interrogation vertigineuse formulée par Leibniz au XVIIè siècle: pourquoi y a t-il quelque chose plutôt que rien? Leibniz pensait cette question en philosophe et en mathématicien.
c) De la relativité au calcul binaire. Leibniz, qui s'est fortement opposé à l'idée de temps absolu de Newton, en incroyable précurseur, comme s'il avait "vu" la relativité deux siècles en avance est le découvreur du calcul binaire. Dans un compte-rendu de l'académie des sciences daté de 1703, on trouve un article prophétiquement intitulé "explication de l'arithmétique binaire, qui se sert des seules caractères 0 et 1". Un quart de millénaire avant la naissance de l'informatique, on y sent passer le souffle du futur. Selon les frères Bogdanov, il s'interrogea "longuement sur les applications possibles de ce calcul binaire, s'émerveillant de la facilité d'un tel procédé pour tout calculer: non seulement des chiffres mais aussi des choses!"
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d) Vers l'Univers information. Le réel, une scène banale sur une photographie, si simple à interpréter, va devenir incompréhensible si je la réduis à ce qu'elle est réellement, une image numérique, une suite: 01100010001101100011100000011... Comment puis-je établir le moindre rapport entre cette suite de 0 et de 1 et la couleur d'un chapeau sur la photo. La réalité n'est donc pas ce qui paraît sur l'écran. La substance ultime de ce que j'interprète m'est totalement inaccessible. Ce qui est vrai pour cette photo l'est pour la réalité toute entière. L'essence profonde des objets qui nous entourent nous échappe. Nous savons(?) que ces matériaux se décomposent en molécules, qui elles-mêmes, se décomposent en atomes. "Au-dessous" des atomes, il y a des particules élémentaires, des électrons, des protons, des neutrons...Et ce que nous pouvons "voir" à ce niveau, c'est surtout du "vide". Le premier niveau, le tissu des choses est incroyablement loin... Ce qui, à notre échelle, dans notre monde ordinaire, représente une chaise cohérente, n'est plus qu'un essaim de particules tourbillonnant dans tous les sens, essaim auquel nous ne comprenons plus rien et dont on est bien incapable de dire qu'il forme une chaise. La seule chose qui compte, nous dit la physique, ce sont les interactions entre particules. Et à ce niveau profond de la réalité, nous allons retrouver les 0 et les 1 nous disent les théoriciens de la physique numérique.
jeanzin.fr écrit à propos de notre ère actuelle (information et communication) : "Nous vivons une révolution comme l'humanité en a connu bien peu dans son histoire, un véritable changement d'ère qui se produit à une rapidité inouïe et dont nous arrivons difficilement à prendre toute la mesure. Les technologies numériques et informatiques ont bouleversé nos modes de vie et de production [...]".
e) La Théorie de l'information et l'Univers. Grégory Chaitin, père du vertigineux "nombre de Chaitin", et qui tient Leibniz pour son premier maître a écrit :"Dans les bits 0 et 1, Leibniz pressentait véritablement une puissance combinatoire capable de donner naissance à l'Univers tout entier". Jonh Wheeler a lancé une formule légendaire "it from bit", qui marque le point de départ d'un mouvement conceptuel qui paraît maintenant irréversible. Pour lui, "It from bit symbolise l'idée que chaque élément du monde physique a un fondement très profond dans la plupart des cas, correspondant à une source immatérielle. ce que nous appelons réalité provient, en dernière instance, des questions "oui" ou "non". [D'où vient "it fir bit"? ou https://arxiv.org/pdf/1306.0545.pdf]
Les idées et les interrogations de Lubos Motl vont dans cette nouvelle direction. Pour lui, "peut-être que la forme la plus fondamentale de l'existence se situe hors de l'espace et repose sur différentes formes d'information qui n'admettent pas une interprétation géométrique simple" (voir l'équation Bogdanov. que nous retrouverons à la fin de cet article) Alors le "fond" de la réalité ne serait pas ait d'atomes et de particules élémentaires, mais de bits et de qubits d'information? Ces nouvelles idées sur l'information commencent à s'implanter. Une nouvelle communauté de chercheurs s'est regroupée autour de Seth LLoyd, Stephen Wolfram, Charles Bennett, David Deutsch (son livre: l'étoffe de la réalité. Il est aussi darwiniste "fort, comme Dawkins), Peter Shor et beaucoup d'autres. On retrouve chez eux l'hypothèse avancée par Leibniz trois siècles plus tôt: le fond de la réalité, son étoffe première, n'est pas composé de particules matérielles mais d'information. David Deutsch, professeur de physique à l'université d'Oxford, lauréat du prix Dirac, a été le premier à fournir un algorithme complet de calcul quantique, à l'origine des premiers ordinateurs quantiques. Le mot préféré de Deutsch (est "it from qubit"). A ses yeux, la substance de la réalité n'a rien de matériel, mais se réduit à un nuage binaire fait de 0 et de 1: "La séquence infinie de zéros et de un dans son expansion binaire (une quantité infinie d'information observable), se trouve présente dans n'importe quel objet habituel" (dans Science and Ultimate Reality: Quantum Theory, Cosmology and Complexity -2003). Les 0 et les 1 sont, comme on l'a vu, la "matière première" des qubits, les unités d'information quantique qui existent dans l'infiniment petit, ce qui permet à Deutsch de conclure, sûr de lui: "le monde est fait de qubits". [A noter l'ultra matérialisme de L'Étoffe de la réalité (The Fabric of Reality en anglais) est un ouvrage grand public du physicien britannique David Deutsch, où il présente quatre mécanismes de base comme présidant à la construction du monde réel, aussi bien que de notre connaissance progressive de celui-ci :
Ce point de vue est partagé par presque tous les membres de cette "l'école informationnelle" dont on vient de parler. Il débouche sur la résolution de la très ancienne question, soulevée cinq siècles avant J.-C par les philosophes grecs, notamment Zénon d'Elée avec son célèbre paradoxe d'Achille et la tortue: la réalité est-elle discrète ou continue? Pour les fondateurs de la théorie de l'information quantique, le réel (parce qu'il est constitué de qubits), est à la fois discret et continu, résultat de la dualité onde-particule. Cela permet de résoudre l'une des impasses sur laquelle butait la physique numérique. Mais, cette description, sans doute valide à l'échelle des phénomènes quantiques, a t-elle atteint le fond ultime de la réalité? N'y a t-il pas encore quelque chose qui existe à l'échelle zéro de l'espace-temps, que nous avons entrevu lors de notre plongée vers l'origine du temps dans mes premiers articles? C'est ce que pensent les frères Bogdanov.
e) L'échelle zéro.
Posons-nous d'abord la question: l'Univers a t-il connu un instant zéro? (par Etienne Klein)
Pour Etienne Klein, on ne peut expliquer l'Origine de quelque chose en invoquant autre chose. On n'exprime l'être que par l'être et pas par du devenir. Si on dit qu'à l'Origine il y avait déjà ceci ou quelque chose, on n'explique pas l'Origine, sauf à invoquer que le chose a toujours été là, donc qu'il n'y a pas d'Origine. En fait, pour lui, la science(?) ne peut dire que deux choses:
a) Il n'est pas prouvé que l'Univers a eu une Origine, qui serait le transit qui fait passer de l'absence de toute chose à au moins une chose.
b) Il n'est pas prouvé que l'Univers n'a pas d'Origine.
Si on se réfère à des philosophes comme Kant, on peut dire que, de même que les questions relatives à Dieu, cette question relève du domaine de l'inconnaissable. mais de nos jours, les limites reculent de plus en plus mais il reste l'indécidable au sens de Gödel même si les théories fusent comme la théorie des cordes ou la gravitation quantique à boucles et les univers en rebond.
Ici se situe la redoutable singularité de Friedmann, ce point marquant, en temps imaginaire pur selon les frères Bogdanov, l'origine de tout ce qui est, comme on peut le voir dans mon article Au commencement du temps 3-11) l'instant zéro.
Comment les Bogdanov voient-ils cet instant? : Il pourrait "encoder", sous une forme mathématique, la totalité des informations qui ont donné naissance à notre Univers. Il n'y existe plus que deux types de "particules": les monopôles et les instantons. ce sont eux les premiers habitants de l'Univers avant le Big Bang, les premier "Parisiens", avant toutes les autres particules...
Comment peut-on imaginer ce moment unique? Le temps fluctue à l'échelle de Planck entre la direction réelle et la direction imaginaire. Les monopôles et les instantons se couplent et se découplent, les deux familles se transforment l'une dans l'autre à un rythme frénétique, mais chacune a son territoire. Au voisinage de la longueur de Planck, immédiatement avant et après le Big Bang, ce sont les monopôles qui dominent, les instantons sont encore rares et n'apparaissent qu'avec de fortes fluctuations quantiques, qui détruisent l'enveloppe du cône de lumière de l'espace-temps.
Puis peu à peu, à mesure qu'on s'enfonce vers la singularité initiale, leur nombre augmente. A mi-chemin (ce mot a certes peu de sens, mais l'échelle nous est fournie par les populations respectives d'instantons et de monopôles), il y a autant d'instantons que de monopôles. Les particules (monopôles) se transforment en pseudo-particules (c'est le nom qu'a donné le physicien russe Alexander Polyakov en 1975 aux instantons).
Ces transformations illustrent les fluctuations de la quatrième coordonnée de l'espace-temps, (le temps), mais elles expriment aussi la transition d'une configuration portant de l'énergie (les monopôles) vers une configuration portant de l'information (les instantons).
Poursuivons notre descente. Nous parvenons finalement à une région où les terribles remous quantiques se sont calmés. Autour de nous, tout est d'un grand calme, silencieux, d'une immobilité presque glacée. Il n'y a pratiquement plus de monopôles, rien que des instantons dont le rayon décroît à mesure qu'on se rapproche de la singularité initiale. Notre voyage touche à sa fin. Nous sommes en bas du cône de lumière dont les contours s'estompent. Nous "voyons" à présent la nappe lumineuse, inouïe de la singularité initiale de l'espace-temps.
(On peut sans doute se poser la question: est-ce que le voyage que nous venons de faire serait similaire si on pénétrait dans un trou noir?).
Et arrivons à l'instanton initial de taille zéro.
Nous pouvons voir cette nappe lumineuse qui vient de nous apparaître, entamons une nouvelle descente. A présent, les instantons, devenus totalement stables, dominent le paysage. Ils se mettent à converger en une étonnante spirale vers le point zéro. A mesure qu'ils s'en rapprochent, leur rayon diminue et ils commencent à se superposer et à se fondre les uns dans les autres. En effet, une propriété de ces objets existant en temps imaginaire est de pouvoir se condenser en un seul point. Ce fait me semble "similaire" à la propriété des photons qui n'obéissent pas au principe d'exclusion contrairement aux particules de matière comme les électrons. Ainsi, il se produit une chose importante: la densité de charge topologique, c'est à dire l'information augmente au voisinage du point zéro. Elle peut même devenir infinie si le nombre d'instantons tombés sur ce point est lui-même infini.
Un nouveau phénomène apparaît alors: les instantons (tous les instantons) finissent par disparaître au sein du tout dernier (du tout premier?) instant présent à l'instant zéro, l'instanton singulier de taille zéro. Invraisemblable?
Au milieu des années 1990, le théorie des instantons de taille zéro a été étudiée par de grands physiciens dont Edgar Witten qui a écrit en 1995 un article intitulé "petits instantons en théorie des cordes" où il montre l'existence et les étranges propriétés de ces instantons. En particulier, il se demande ce qui va se passer lorsqu'un "instanton rétrécit jusqu'à la taille zéro". Dans notre hypothèse, cela signifie: il correspond à ce que pourrait être la singularité initiale.
Instanton initial et information originelle.
La singularité initiale devient de plus en plus sensible. Nous voici près de toucher cet instanton initial qui marque le début absolu des choses. Il pourrait contenir, en temps imaginaire, l'information indispensable à la naissance et à l'évolution de l'Univers tout entier. Le monde physique a disparu, cédant la place à la place d'un monde de mathématiques pures. Le temps réel et a cessé d'exister, de même que l'énergie. Ils sont remplacés par du temps imaginaire, de zéro jusqu'à l'infini. Est-ce ainsi que Platon aurait pu voir le monde des idées? En imageant ceci, c'est un peu comme dans les sillons d'un DVD: lorsqu'il est dans sa boite, l'image qu'il contient n'existe (n'est en fait codée), que dans le temps imaginaire. Elle ne deviendra réelle que lorsque le DVD est placé dans un lecteur, pour alors se dérouler dans le temps réel. Selon cette vision, on peut s'imaginer l'instanton singulier de taille zéro comme la source, en temps imaginaire, du "scénario" cosmologique de l'Univers. Au moment du Big Bang, ce scénario commence à se dérouler dans le temps réel et une infinité d'évènements vont se retrouver étalés dans le temps tout au long de l'histoire de l'Univers. Une question me paraît cependant encore mystérieuse à ce point du voyage: les conditions initiales et le "choix" des lois physiques sont-ils aussi l'issue de cette source?
f) De l'énergie à l'information?
Premier constat: au point zéro, le temps réel, celui que nous connaissons à la surface de cette "plongée" dans le temps jusqu'à l'instant zéro, a bel et bien disparu sans laisser de traces. Nous sommes baignés dans un océan sans fond, sans limites de temps imaginaire dont les "particules" représentatives sont les instantons. Une particularité de l'Univers au voisinage de cette singularité initiale est que son entropie, (son désordre) est nulle.
Deuxième constatation: toute échelle de distance s'est évanouie, tous les repères qui nous permettent d'établir l'échelle des objets s'évanouissent également. Nous sommes immergés dans une sorte d'absolu qui n'a ni haut ni bas, ni proximité ni limite, à la fois ponctuel et infini, en fait indescriptible par la métrique habituelle.
Troisième observation.
L'énergie, celle qui déferlera en de furieux torrents à l'échelle de Planck, au moment du Big Bang, n'existe plus du tout, ou plutôt pas encore, de même que le temps réel. Donc, contrairement à l'image habituelle proposée par les astrophysiciens, la singularité initiale n'est pas caractérisée par une température infinie, une courbure divergente et une énergie infinie. Elle est dominée par une réalité duale de l'énergie, l'information initiale. C'est une conséquence de la nullité de l'entropie. Entropie et information sont "inverses" l'une de l'autre. Une entropie nulle signifie que la quantité d'information du "système Univers" est alors maximale. "L'information initiale "codée" au point zéro pourrait, par construction, atteindre une valeur infinie (même si l'information finale - sous forme de complexité- est, elle, très grande, mais finie)".
Pourquoi parle-t-on d'information? L'évolution d'un système en mécanique quantique, en fait son énergie, est décrite par l'équation de Erwin Schrödinger. Le temps y est représenté explicitement par le symbole t. Que se passe-t-il si nous y remplaçons le temps réel par le temps imaginaire, opération qu'on appelle prolongement analytique? On tombe alors sur une équation plus ancienne, mais tout aussi célèbre, appelée "équation de la chaleur". L'équation de Schrödinger apparaît en effet comme une équation de la chaleur en temps imaginaire. Or, l'équation de la chaleur ne donne plus accès à une évolution en termes d'énergie, mais, étrangement en termes d'information (entropie = inverse de l' information). On retrouve cette correspondance entre énergie et information en partant d'autres formes mathématiques comme l'opérateur d'évolution de Heisenberg, équation qui décrit l'évolution d'un système en temps réel Il est possible, à partir de l'état d'équilibre de retrouver la même équation, mais construite en temps imaginaire pur.
Quelle conclusion peut-on en tirer? "L'état d'équilibre idéal que représente l'échelle zéro peut-être vu comme équivalent à une évolution du pré-Univers en temps imaginaire. Autrement dit, à un codage à l'instant zéro de l'information initiale".
Densité de charge topologique et information de l'instanton. Une des propriétés fondamentales de l'instanton est sa "charge topologique". Là se trouve "stockée" toute l'information qui le caractérise. Or, cette propriété est indépendante de sa taille. Cela veut dire que la charge topologique, l'information, est conservée et existe toujours, même si l'instanton a un rayon nul. Or, l'instanton singulier de taille zéro résulte de l'accumulation en un point singulier de tous les instantons, d'une infinité d'instantons selon le principe de superposition. Ce résultat implique deux choses:
a) Ce qu'on va trouver sur notre instanton singulier, c'est sa charge topologique, c'est à dire une information initiale précieuse. Ce qui est considéré comme information la plus importante est un nombre entier qui caractérise l'instanton et que les experts appellent le "nombre d'instanton". S'agissant de l'instanton singulier qui, par construction est unique, ce nombre est 1.
b) Mais comme l'instanton initial résulte de l'accumulation d'une infinité d'autres instantons, la charge topologique atteint une valeur infinie.
Cela voudrait donc dire que l'information portée par l'instanton singulier de taille zéro a une valeur infinie.
A ce sujet, les frères Bogdanov font remarquer qu'Edward Witten observe dans son article consacré aux instantons de taille zéro: "Lorsqu'un instanton rétrécit jusqu'à la taille zéro, l'espace-temps développe un tube infini dans lequel le dilaton (voir aussi dilaton) devient infini". Qu'est ce que dilaton? Un champ primordial de type scalaire qui agit sur la facteur d'échelle de l'Univers. Il peut permettre de comprendre l'expansion de l'Univers et en particulier la phase appelée inflation. Le fait que pour Witten, l'espace-temps développe un "tube infini" lorsqu'un instanton a un rayon nul, débouche ainsi sur l'infini de la densité de charge topologique.
g) Les nombre-univers
Comme nous venons de le voir, la charge topologique de l'instanton est caractérisée par un nombre entier (généralement 1). Sa densité de charge peut être vue comme la suite infinie des nombres entiers. A partir de là, on peut construire tous les nombres, réels et imaginaires. Le temps (pas encore le temps réel ou le temps imaginaire) peut être vu alors comme la suite de nombres (réels ou imaginaires). L'expansion de l'instanton initial de taille zéro dans ce qu'on appellera "l'espace des modules" de l'instanton peut donner une idée du changement d'échelle (Nous retrouvons le dilaton de Witten (https://arxiv.org/pdf/hep-th/9407118.pdf) grâce auquel on peut décrire le commencement du flot temporel). Il est également possible d'écrire cette suite en langage binaire et de construire ce que les mathématiciens appellent un "nombre-univers" dans lequel se trouve n'importe quelle succession de chiffres de longueur finie. A partir de là, nous disposons potentiellement le moyen de "coder" toutes les séquences d'information possibles et imaginables et donc de quoi engendrer les 10120 bits d'information qui selon Seth Lloyd ou Stephen Wolfram suffisent pour coder notre Univers tout entier et appelé la limite de Lloyd. Ce chiffre paraît relativement petit? oui et non! c'est le plus grand nombre qui ait un sens du point de vue physique. Il est supérieur aux nombre de particules composant l'Univers. En revanche, il est ridiculement petit, presque inexistant, face aux très grands nombres calculés par les mathématiciens, nombres qui donnent le vertige. Partons par exemple du "gogol", qui a donné son nom à "google", le moteur de recherche inventé en 1938, et qui vaut 10 puissance 100, nombre encore plus petit que le nombre de bits calculé par Lloyd. L'ascension commence avec le "googleplex" défini comme (10 puissance gogol), soit ((10 puissance 10) puissance 100). Ce nombre est tellement grand, que, s'il fallait l'écrire en entier, à la vitesse de 3 chiffres/seconde, il faudrait 100 mille milliards de milliards, de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de milliards d'années, c'est à dire des milliards de milliards de fois plus de temps qu'il ne s'en n'est écoulé depuis le commencement du temps. Et pour le stocker avec tous ses chiffres dans un ordinateur, il faudrait une mémoire de la taille de l'Univers! C'est impressionnant. En 1933, alors qu'il était étudiant à Cambridge, il a eu l'idée, surprenante de simplicité, de construire ce nombre très particulier, qui est une constante, la constante de Champernowne. Ce nombre est étonnamment simple à construire: en base 10, il est formé de 0, d'une virgule et ensuite de la suite des nombres entiers. Ce qui nous donne 0,1234567891011... C'est un nombre univers dans lequel nous pouvons retrouver notre date de naissance, notre première dissertation, le livre que nous tenons dans la main, la Bible ou les oeuvres complètes de Victor Hugo. Il contient absolument tout ce qui existe dans l'Univers. Si maintenant, nous écrivons notre constante de Champernowne en base 2, le début s'écrit: 0,1101110010111...Nous avons donc, en principe, de quoi écrire en langage binaire le grand nombre 10120 correspondant, comme nous l'avons vu avec Seth Lloyd, au nombre de bits d'information de l'Univers entier.
h) Y a t-il un code ( cosmologique) initial comme le pensent les frères Bogdanov?
Dans l'infiniment petit,il apparaît raisonnable de penser que, lorsque la physique quantique domine tous les phénomènes, les bits habituels d'information, ceux qu'on retrouve à notre échelle de tous les jours, sont remplacés par des qubits. Au delà du mur de Planck, avant le Big Bang, le pré-Univers (selon le point de vue David Deutsch), est "fait de "qubits". Ce sont ainsi eux qui règlent les fluctuations entre le temps réel et le temps imaginaire. Mais si la plupart des théoriciens s'arrêtent à ce stade, les frères Bogdanov pensent que les qubits ne constituent pas les entités d'information ultimes. Pourquoi? Parce que le niveau quantique, bien qu'essentiel pour comprendre l'Univers, n'en constitue pas la trame fondamentale. Il y a encore autre chose de plus bas, "au-dessous". Où donc?
Est-ce là le secret des choses? Nous venons de voir qu'au point zéro, l'énergie n'existe pas encore. A la place nous trouvons une information primordiale. A la suite des travaux des mathématiciens sur les théories dites "topologiques", elle est appelée un "invariant topologique" (en travaillant sur les propriétés des instanton et la topologie, le mathématicien anglais Simon Donaldson, les a découverts (en particulier le premier invariant de Donaldson, voir sa théorie) et a obtenu la médaille Fields) .
Cet invariant initial est une sorte d'être mathématique, un "code" qu'on appellera "code cosmologique". Par "construction", cet "être mathématique" pourra contenir toute l'information qui va permettre par la suite à l'Univers d'apparaître et d'évoluer dans le temps. On pourrait en donner l'image d'un code similaire au code génétique qui contient sous forme "codée" toute l'information qui va permettre à un organisme de se développer. Sous une forme binaire, nous pouvons en extraire n'importe quel type d'information. Cependant, il est impossible d'en connaître la loi initiale, l'algorithme qui permet de le déchiffrer. Peut-être ce qu'on peut extraire de l'Origine, de ce point zéro, est-il l'existence d'un "trace" comme en algèbre, ou en topologie? Ici, la somme est calculée sur le nombre d'instantons de la théorie qui est dans l'hypothèse retenue, infini. Retenons donc que c'est cette trace qui renferme la "loi" à partir de laquelle le code cosmologique pourrait être élaboré, tel un code génétique..
Question ultime avant de terminer le voyage de zéro à l'infini: pourquoi va-t-on passer de la taille zéro (taille de l'Univers à l'instant zéro) à tout ce qui existe aujourd'hui qui s'est "étalé" sur des milliards d'années-lumière tel le DVD qui nous a servi d'image pour illustrer le déroulement de cette histoire du monde initialement dans le zéro de cet instanton initial et se déroulant maintenant dans le temps réel? Quel est donc le "premier moteur" à partir duquel le temps va commencer sa longue course?
Que voyons nous face à cette singularité initiale? A vrai dire rien ! ce n'est qu'un point mathématique, une abstraction invisible qu'on peut représenter par 0, "ce zéro dont va jaillir, des milliards d'années plus tard, notre galaxie, puis la Terre, les insectes géants, les dinosaures et, bien plus tard encore, la Gaule et tous ses habitants puis la France, Paris, la place du Trocadéro et ses cafés, le champ de Mars et la tour Eiffel", bref, tout ce que nous avons vu dans mes articles (voir à la fin de cet article), au cours de ce voyage à l'envers dans le temps et cette plongée dans le passé.
Tout serait contenu dans le zéro? Tel était sans doute le rêve de ce moine anonyme, dans les brumes solitaires du Moyen-Age, au IIè siècle, lorsqu'il écrivait dans le codex de Salem ainsi que le cite lestoutespremieresfois.com « chaque nombre jusqu’à l’infini a jailli de 1 et, par conséquent, de 0. En ceci réside un profond mystère ».... Omnia ex nihilo creat, conservat, et gubernat." Les frères Bogdanov citent une anecdote que raconte Jonh Von Neumann, fasciné par ce nombre, avait pour répondre avec un sourire sarcastique à ceux qui se plaignaient que les mathématiques étaient incompréhensibles: "On ne comprend pas les mathématiques! Tout au plus peut-on s'habituer à elles."
Selon lui, le zéro permet d'engendrer, à partir d'un ensemble vide noté , tous les nombres réels. il est ainsi possible, à partir de zéro, d'assister à un véritable "Big Bang" numérique. Comment? en utilisant la théorie des ensembles et c'est ce qu'a fait le grand Von Neumann: Selon la définition donnée par John von Neumann dans les années 1920, l'ensemble des nombres entiers naturels ? a pour éléments 0 = Ø, 1 = {Ø} = {0}, 2 = {Ø, {Ø}} = {0, 1},..., « successeur de n » = {0, 1, 2, ..., n}, etc., le successeur de n étant noté < […]
La première étape consiste donc à partir de l'ensemble vide qui ne contient rien, puis en deuxième étape, on place cet ensemble dans un autre ensemble vide. Et miracle(?), nous avons engendré un élément et donc "créé" le chiffre 1 à partir du zéro. On fait ainsi surgir tous les nombre possibles: les entiers, les relatifs, les algébriques, les transcendants, les imaginaires etc. On peut ainsi fabriquer les espaces multiples à 2, 3, 4...dimensions et bien d'autres choses. Il n'y a en théorie aucune limite à ce qu'il est possible d'engendrer!
C'est peut-être cette intuition qui amena la mathématicien allemand Léopold Kronecker (ennemi juré de Cantor, autre mathématicien de génie) à s'exclamer: "Dieu a créé les nombres entiers. L'homme a fait le reste." Est-ce cette possibilité qui a mis Von Neumann sur la piste du premier logiciel informatique, avec l'ordinateur ENIAC en 1945?
Et qu'est-ce que le zéro serait capable d"engendrer? Le nombre de Lloyd dont nous avons parlé au chapitre g), soit 10120 bits. Selon lui, ce nombre majore le nombre de bits d'information traités par l'univers depuis le Big Bang. Combien de temps a t-il fallu à l'Univers pour "dérouler" ce nombre? 13 milliards 700 millions d'années! Mais, à l'échelle de l'infini qu'engendre le zéro, ce nombre est ridiculement petit.
Une autre caractéristique du 0 est le fait que n'importe quel nombre élevé à la puissance 0 soit 1. La meilleure (?) convention possible adoptée aujourd'hui par la plupart des mathématiciens concernant la valeur de 0 puissance 0 est non pas une valeur indéterminée mais 1. de même, la factorielle de 0 n'est pas 0, mais à nouveau 1 par convention. On touche ainsi du doigt le formidable "potentiel d'engendrement" du zéro qui a fasciné tant de mathématiciens.
Mais il y a encore un propriété du zéro, peut-être la plus extraordinaire: ce nombre est à la fois réel et imaginaire pur, autrement dit il peut être vu comme un nombre complexe. En effet, il peut s'écrire 0 + 0i. Quelle est la conséquence de ce fait mathématique simple? A l'Origine, le zéro n'est pas un être stable, il a un contenu dynamique lié au faut qu'il fluctue, qu'il oscille entre sa forme réelle et sa forme imaginaire pure. C'est peut-être là l'origine profonde, la plus fondamentale de ce qui a été appelé par les frères Bogdanov la fluctuation quantique de la métrique originelle, la fluctuation du temps entre sa forme réelle et sa forme imaginaire pure. Le secret du commencement du temps - l'infini -à partir de zéro. C'est donc avec cette image-miroir énigmatique, le reflet de l'infini au fond du zéro, que s'achève notre fabuleux voyage, la remontée du temps vers l'Origine.
En conclusion, les frères Bogdanov proposent l'existence à l'origine d'une information initiale portée par un algorithme (une loi simple d'engendrement), dont la structure est essentiellement numérique, la base adoptée étant, comme pour les calculs informatiques, la base binaire entrevue par Leibniz.
a) La singularité initiale porte donc une seule information: l'information initiale. En effet, comme le temps réel n'existe pas encore, il n'y a aucune complexité à cet instant zéro. L'information finale est donc nulle. Cette singularité initiale peut être considérée comme l'objet le plus simple de notre univers. Comment peut-on expliciter l'information initiale? C'est l'entropie du pré-Univers à l'échelle zéro qui peut en suggérer l'existence et la quantité. Cette entropie, le désordre de l'Univers, doit être considérée comme nulle, ce qui a deux conséquences. En premier lieu, un système caractérisé par une entropie nulle ne peut exister en temps réel. Le point zéro ne peut donc exister qu'en temps imaginaire pur. La deuxième conséquence est que l'information initiale portée par le point zéro est nécessairement infinie (l'entropie est l'inverse de l'information).
b) En conséquence, l'information initiale déroule une infinité de bits, infiniment plus que que les 10 puissance 120 bits nécessaires pour "construire" l'Univers (la limite de Lloyd, qui majore le nombre debits d'information traités par l'univers depuis le Big Bang. Cette limite est estimée par ses calculs à 10120 bits).
Elle pourrait correspondre l'existence de ce que Lloyd, Deutsch, Wolfram, Bennet et d'autres appellent un programme. A quoi pourrait ressembler un tel code? Impossible de le dire, on peut seulement en suggérer l'existence et quelque unes de ses caractéristiques telles qu'on peut les supposer.
Pour la première, il devrait s'agir d'une structure numérique, voire digitale. A partir de là, il est plausible de d'imaginer à l'échelle zéro l'existence d'un invariant, en fait d'une constante. C'est le cas de la constante de Champernowne. En continuant dans cette voie, on peut construire un algorithme permettant de générer le nombre univers de Champernowne en binaire. Nous touchons alors à la dernière étape: à partir de zéro et d'un algorithme simple, il est possible d'engendrer en base binaire un nombre univers la plus simple, le nombre de Champernowne. Ce nombre, comme nous l'avons vu, contient toutes les suites numériques (les suites digitales) possibles et imaginables.
c) C'est comme le pensait Leibniz, un nombre plus vaste que l'Univers. Ainsi, "dans ce temps imaginaire, ce temps de la première aube, le nombre univers le plus simple pourrait bien contenir la complexité la plus haute que l'esprit humain puisse entrevoir. Peut-être est-ce dans ce sens qu'il faut comprendre ces mots que Jonh Wheeler répétait souvent vers la fin de sa vie: "A présent, je pense que tout, absolument tout dans l'Univers, se résout, finalement, à de l'information"." (Jonh Wheeler dans Geons, Black Holes, and Quantum Foam).
La singularité initiale porte donc une seule information: l'information initiale. Le point zéro ne peut exister qu'en temps imaginaire pur. La conséquence est que l'information initiale portée par le point zéro est nécessairement infinie. Si nous suivons Jonh Wheeler, tout, absolument tout dans l'Univers, se résout, finalement, à de l'information.
Le Mystère qu'évoque Carlo Rovelli et qui est le titre de cet article nous a amenés à La singularité initiale, qui porte une seule information: l'information initiale. Selon les frères Bogdanov, le point zéro ne peut exister qu'en temps imaginaire pur. La conséquence est que l'information initiale portée par le point zéro est nécessairement infinie.
Si nous suivons Jonh Wheeler, tout, absolument tout dans l'Univers, se résout, finalement, à de l'information.
Je rajoute en complément deux éléments qui vont aussi orienter mes futures réflexions.
a) Mon article récent "Equation du tout et ...information"
b) Un article de Mario Cosentino (http://fdier.free.fr/UniversQuantique.pdf): Une cosmologie quantique par la théorie de l'information: Comment notre Univers se comporte comme un gigantesque ordinateur calculateur programmé par les paramètres fondamentaux de la physique
c) Un article du blog dieuexiste.com: "Le fameux Max Tegmark, dont j'ai généreusement parlé dans le post précédent" (La richesse de l'univers trouve son explication en Dieu).a proposé le schéma suivant dans son article": Is “the theory of everything” merely the ultimate ensemble theory?
L'équation Bogdanov par le Pr de Luboš Motl
son blog: https://motls.blogspot.com/
Les Bogdanov auraient-ils percé le secret de l'origine de l'Univers ? Un ancien chercheur de Harvard, le Pr Lubos Motl, répond à cette question.Existait-il " quelque chose " avant le big bang ? Telle est la question que se sont posée Igor et Grichka Bogdanov. Pour la première fois, un des plus grands spécialistes du sujet, le Pr Lubos Motl, analyse et confirme. En 2002, les frères Bogdanov déclenchent une tempête dans le monde scientifique en publiant six articles sur l'origine de l'Univers. Des articles parus dans les meilleures revues de physique théorique, notamment la prestigieuse Annals of Physics dont les experts ont conclu que les Bogdanov apportaient des solutions nouvelles aux problèmes de l'origine du temps et de l'espace en dessous de l'échelle de Planck, avant le big bang. Dans les laboratoires, les discussions s'enflamment. Les Bogdanov sont-ils de véritables chercheurs ou bien s'agit-il d'un canular ?
Un expert, ancien professeur de l'Université de Harvard, a analysé en profondeur leurs travaux. Il nous livre ses conclusions dans cet ouvrage : les Bogdanov proposent rien de moins qu'une théorie alternative à la gravité quantique. De même qu'il existe un code génétique à l'origine des êtres vivants, il pourrait ainsi exister un " code mathématique " à l'origine de l'Univers tout entier.
Avec les frères Bogdanov: Au commencement du temps 4-9 partie 2) L'Univers information deuxième partie
Mes autres articles déjà parus dans cette rubrique "au commencement du temps:
Au commencement du temps 1) introduction
Au commencement du temps 2) En voiture vers l'origine (le graal de la physique)
Au commencement du temps 3-1) 2009-1979 le film du temps vu à l'envers: pour commencer le voyage, un rocher sur le ligne d'Univers étape 1.
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Au commencement du temps 3-9) l'étincelle du big bang 10-puiss-43-secondes après le big bang
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monblogdereflexions: l'affaire Bogdanov un de mes premiers articles
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Au commencement du temps 4-8) Au fond d'un trou noir
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